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Le 28 octobre dernier, Julie Stanton est décédée. La phrase est brutale; le fait ne l’est pas moins. Dix jours auparavant, elle travaillait sur son dernier manuscrit intitulé Ta mort me tue (elle aimait imaginer que le comité de lecture tordrait du nez devant ce titre, tout en ajoutant: « ils vont dire que c’était prémonitoire ». Et cette perspective l’amusait beaucoup). On a beaucoup parlé de l’engagement de ses textes, des injustices qu’elle dénonçait, de l’espoir qui affleurait toujours son propos, mais ce qui traverse en premier lieu son œuvre, c’est ce qui la nourrissait au quotidien: l’amour.

- L’amour des siens (Élie ma joie, Mémorial pour Geneviève et autres tombeaux, L’ultime lettre d’amour, Ta mort me tue) et notamment de sa fille, Geneviève, décédée de la sclérose en plaques
tu es venue de chair et de sang
avec une odeur de sucre
j’avais le total excès de toi
l’impudeur de la passion
ses délices terribles
le lexique des dangers
à portée de la main
devant la possibilité du malheur
les coups bas des dieux
leur machine à broyer
qu’importait je t’adorais
(Mémorial pour Geneviève et autres tombeaux, p. 23)
- l’amour de la vie (Dans le blanc des âges, Le Bonheur, cet illusionniste, L’ultime lettre d’amour),
Je veux connaître la suite toute la suite
la globalité de la suite.
La source les épis; les générations qui mettront le feu aux poudres.
Souhaitons que ce soit vrai.
(Dans le blanc des âges, p. 50)
Il y eut un soir
il y eut une aurore
des lendemains
multipliés par dix et mille.
Puis nous avons cessé
de compter.
Ça ne serait jamais assez.
(L’ultime lettre d’amour, p. 61)
- l’amour de la littérature (On pense évidemment à Requiem pour rêves assassinés: Hommage à Pablo Neruda, qui lui avait valu d’être reçue en grande pompe à la Chascona, mais toute son œuvre est traversée de citations de poètes auxquels elle souhaitait rendre hommage). Ce que l’on connaît moins de Julie Stanton, c’est cette faim inextinguible de littérature qui la caractérisait. Elle lisait comme on respire. Elle lisait les titres qui faisaient la rentrée littéraire, Dominique Fortier avec fidélité et assiduité, Kim Doré, Audrée Wilhelmy, Kim Thuy, Catherine Mavrikakis, Martine Delveaux, Kateri Lemmens, Jean-François Beauchemin, Laure Adler, Maylis de Kerangal, Louise Glück, Marguerite Duras, Amélie Nothomb, Édouard Louis, entre autres. Julie Stanton était une lectrice exigeante, fréquentait assidûment les bibliothèques de Québec (la dernière année, « sa » bénévole lui était très précieuse), ainsi que la librairie du Quartier « Ils sont si gentils qu’ils me portent les livres à ma porte. »
- l’amour de l’humanité et de notre planète, qui traverse toute son œuvre
L’oubli
de ce qui aura été pour tes pères et mères
sur des myriades de générations le cri
premier fugitif et terrifiant. Gardiens
d’une telle opulence. Tant de caribous!
Tant de rivières intactes! Ça papillonnait
de monarques, de lutin givrés et de
noctambules sombres. Les sources abon-
daient dans les gosiers.
(Nos lendemains de feu, p. 25.)
- l’amour et la foi en la jeunesse,
Votre vieux monde nous vous le laissons
nous en inventerons un nouveau ça
devrait changer d’allure redevenir d’une
grande beauté après que nous aurons
semé la pagaille ici là partout pour donner
libre cours à l’espérance rageuse le futur
aura le cran de notre jeunesse en herbe
entendez-vous dans vos tours d’ivoire cla-
quer les sabots virtuels de nos chevaux de
bataille on jurerait qu’ils sont vrais tous
au galop tous à la charge.
(Nos lendemains de feu, p. 69)
- l’amour de la sensualité
Les marées d’équinoxe
les paysages le souffle coupé.
L’aurore la falaise le grandiose
lui et moi
son œil mon œil.
Le carrousel des souvenirs.
Au lit, je les dénude
le lit s’embrase.
Je brûle
toujours avec ferveur.
(Dans le blanc des âges, p. 22)
- L’amour pour son mari, Régis Mathieu (L’ultime lettre d’amour, Dans le blanc des âges, Ta mort me tue)
Chaque 12 mai, tu es là mais plus là.
Pour la première fois
ton vertigineux manteau de suède
ton feutre à la Harrison Ford dans Indiana Jones
ta sacoche lourde de tes passions.
Déjà conquise.
(Ta mort me tue, à paraître)
Il est difficile de conclure sur une vie que l’on aimerait inachevée, inachevable. Alors pour que la poète jamais ne meure, lisez. Lisez Julie Stanton. Découvrez la force de ses mots, traquez les indices et devinez la Femme (oui, je lui ai mis une majuscule).
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